Dokument-Nr. 3347

Ludwig III. von Bayern: Mémoire concernant la seigneurie d'Eywanowitz en Moravie, sur le territoire de la République Tchéco-Slovaque. [Wildenwart bei München], 11. Oktober 1920

Feu Sa Majesté1 la Reine Marie Thérèse de Bavière, née archiduchesse d'Autriche-Este, avait hérité, en 1850, du frère de son grand-père, l'Archiduc Ferdinand d'Este, la seigneurie d'Eywanowitz (canton Wischau, Moravie).
La seigneurie, autrefois, a été acquise par achat de la famille d'Auersperg; elle est inscrite au registre provincial ("Landtafel"). Sa Majesté décéda le 3 février 1919. Ses héritiers institués étaient ses trois fils et les quatre filles non mariées lors de sa mort. L'usufruit universel de la succession est légué à l'époux survivant, Sa Majesté2 le Roi Louis III. Le partage de la succession ne doit se faire qu'après le décès de l'époux survivant; par ce future partage le fils aîné de Sa Majesté, le Kronprinz Rupprecht, recevra, à lui seul, la seigneurie. Le testament contient en outre des dispositions instituant des arrière-héritiers et des substitués vulgaires. Le propriétaire d'Eywanowitz sera obligé à servir des rentes viagères à d'autres enfants de la Défunte.
Le Gouvernement Tchéco-Slovaque, après une
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saisie passagère, opérée en 1918, a, en 1919, de nouveau séquestré la seigneurie d'Eywanowitz. Le Ministère de l'Agriculture à Prague a nommé, par ordonnance en date du 17 mai 1919 un séquestre (M. ernard Brodik) qui a pris possession de la seigneurie le 24 mai 1919. Depuis lors la saisie est maintenue. Les propriétaires n'ont jamais appris pour quelle raison et à quel titre l'État Tchéquo-Slovaque a pris cette mesure. Toutes les demandes et réclamations sont restées sans réponse. Contre tout droit on a éloigné le gérant engagé par les héritiers. Les revenus sont entièrement retenus aux propriétaires, même ceux qui datent de l'époque précédant la saisie. On n'accorde même pas aux propriétaires de prendre des renseignements sur la gestion de séquestre.
Il s'agit de mesures tout arbitraires, manquant de base légale.3
Selon le traité de paix de Versailles, entré en vigueur le 10 janvier dernier, l'Etat Tchéco-Slovaque a le droit de liquider les biens appartenant à des ressortissants allemands; toutefois, il est obligé de verser le produit des liquidations aux propriétaires; l'administration forcée n'est pas
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admise par les conditions de paix.
D'après la législation générale de l'Etat Tchéco-Slovaque, il n'est pas admissible non plus de saisir en totalité ces biens-fonds. Ni la loi du 16 avril 1919 concernant la saisie des grandes propriétés foncières, ni aucune autre loi n'en donnent le droit.
Par ordonnance en date du 29 avril 1919 le Ministère de l'Agriculture à Prague a institué l'administration forcée pour tous les biens-fonds particuliers "ci-devant Impériaux et Royaux" sur le territoire de la République Tchéco-Slovaque.
Cette ordonnance est basée sur une loi Autrichienne en date du 24 juillet 1917. Par cette loi, le Gouvernement est autorisé, pendant la durée des circonstances extraordinaires causées par la guerre, à prendre les mesures nécessaires pour aider et soutenir la vie économique, pour éviter des dommages économiques et pour procurer à la population des vivres et d'autres objets de première nécessité.4 Il faut protester, pour la seigneurie d'Eywanowitz, contre l'application de cette ordonnance ainsi que de cette loi Autrichienne.5 La seigneurie ne fait pas partie des biens-fonds "ci-devant Impériaux et Royaux", le propriétaires étant des ressortissants allemands et non pas membres de la famille des Habsbourg.
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Au moment de la publication de l'ordonnance du 29 avril 1919 Sa Majesté6 la Reine était déjà décédée; du reste Sa Majesté7 avait, dès Son mariage (1868), cessé d'appartenir, juridiquement, à la famille "Impériale et Royale". En ce qui concerne les propriétaires actuels, savoir les enfants de Feu Sa Majesté la Reine de Bavière, il est absolument inadmissible de les traiter comme membres de la famille des Habsbourg. Ils bénéficient à tous les points de vue des droits que le traité de paix garantit aux ressortissants allemands.
L'ordonnance du 29 avril 1919 ne saurait donc être appliquée, l'état de cause y prévu n'étant pas donné. Il en est de même en ce qui concerne l'application de la loi du 24 juillet 1919. Toute l'exploitation agricole, à Eywanowitz, est depuis longtemps affermée à une sucrerie, société Tchéco-Slovaque qui exploit les terres, et quant aux forêts, l'exploitation se fait conformément aux règlements et sous le contrôle de l'autorité compétente. C'est pourquoi l'administration forcée manque absolument de raison à moins qu'il ne s'agisse d'y placer des fonctionnaires d'État.
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Même si la saisie de toute la propriété était ordonnée de droit, aucune loi ne permettrait à l'état Tchéco-Slovaque de retenir tous les revenues de la seigneurie.
Dernièrement on apprend que le Gouvernement Tchéco-Slovaque aurait l'intention d'exproprier la seigneurie sans indemniser le propriétaire.
D'après les conditions de paix il n'en a pas le droit, c'est pourquoi il préparerait une loi spéciale dépouillant les membres de la famille des Habsbourg de leurs biens-fonds situés en Tchéco-Slovaquie; parmi les propriétés énumérées dans cette loi figurerait aussi la seigneurie d'Eywanowitz. L'État n'en a pas le droit non plus, comme nous venons de le constater. Le traité de paix n'admet pas d'exproprier sans indemnité, par une loi spéciale, des ressortissants allemands.8
Il reste à faire observer que les autorités Tchéco-Slovaques, s'occupant actuellement de l'administration d'Eywanowitz, prennent des mesures inopportunes et préjudiciables à la fois.
Outre l'administration forcée comprenant toute la seigneurie, l'autorité d'administration politique à Brno a saisi. le 31 janvier dernier spécialement le château ainsi que quelques autres fonds et bâtiments près du château, afin d' y installer l'institut Tchéco-Slovaque pour la production de sérum (Institut Sérologique). Cette mesure extraordinaire,
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portant préjudice au caractère du château et comportant de graves dangers pour l'état sanitaire de la localité entière était basée sur une loi en date de 11 juin 1919 permettant la saisie passagère, sous certaines conditions, de bâtiments non habités pour cause d'utilité publique. Les propriétaires avaient en vain protesté contre cette mesure qui ne répondait pas aux intentions de ladite loi et qui était inopportune, préjudiciable et causait d'énormes frais; on ne voulait pas les entendre; mais l'État, après avoir commencé et presque terminé les travaux d'adaptation, fait tout d'un coup suspendre ces travaux qui lui ont été couté des millions, le ministère compétant venant de s'apercevoir que le projet d'installer là cet Institut, était complètement manqué. Aussi dans cette affaire ne s'est on pas encore occupé à régler les indemnités qui, d'après la loi, sont dues aux propriétaires.
En résumant ce qui précède, l'État Tchéco-Slovaque pourrait liquider les biens-fonds appartenant aux héritiers de Feu Sa Majesté9 la Reine Marie Thérèse; il serait tenu à leur verser le produit de la liquidation. Il n'a aucun droit de refuser l'indemnité. Il n'a pas le droit non plus de prendre et de laisser en administration forcée les biens-fonds et à retenir les revenues aux propriétaires, de nationalité Allemande.
1"Sa Majesté" hds. von unbekannter Hand eingeklammert, vermutlich vom Empfänger.
2"Sa Majesté" hds. von unbekannter Hand eingeklammert, vermutlich vom Empfänger.
3Absatz "Depuis lors la saisie […] de base legale" hds. am linken Seitenrand von unbekannter Hand, vermutlich vom Empfänger angestrichen.
4"Cette ordonnance … de première nécessité" hds. von unbekannter Hand eingeklammert, vermutlich vom Empfänger.
5"Cette ordonnace … de cette loi Autrichienne" hds. am linken Seitenrand von unbekannter Hand angestrichen, vermutlich vom Empfänger.
6"Sa Majesté" hds. von unbekannter Hand eingeklammert, vermutlich vom Empfänger.
7"Sa Majesté" hds. von unbekannter Hand eingeklammert, vermutlich vom Empfänger; dahinter von selber Hand eingefügt: "celle-ci".
8Absatz "D'après les conditions[…] ressortissants allemands" hds. von unbekannter Hand, vermutlich vom Empfänger, am linken Seitenrand markiert.
9"Sa Majesté" hds. von unbekannter Hand eingeklammert, vermutlich vom Empfänger.
Empfohlene Zitierweise
Ludwig III. von Bayern, Mémoire concernant la seigneurie d'Eywanowitz en Moravie, sur le territoire de la République Tchéco-Slovaque, [Wildenwart bei München] vom 11. Oktober 1920, Anlage, in: 'Kritische Online-Edition der Nuntiaturberichte Eugenio Pacellis (1917-1929)', Dokument Nr. 3347, URL: www.pacelli-edition.de/Dokument/3347. Letzter Zugriff am: 29.03.2024.
Online seit 14.01.2013.