Dokument-Nr. 8583
Frey, Carl: Front occidental. Au commencement de juillet 1917, in: Nationalzeitung und Anzeigenblatt der Stadt Basel, Nr. 471, 10. Juli 1917
22v
meuse
désinfection contre les poux (Entlausungsanstalt). La nourriture consiste, par jour, en 450
à 500 grammes de pain, 100 grammes de viande, 1 litre et demi de soupe au ris, par exemple,
que nous avons trouvée très bonne, parfois aux pommes de terre, et deux fois du café. Les
internés ne travaillent que pendant six heures par jour, y compris l'aller à l'endroit du
travail et le retour (constructions de routes, etc.). Ce nombre d'heures a été fixé par le
médecin-major, homme de cœur qui nous a accompagnés pendant notre visite. Pourtant il y a
parmi les internés des hommes qu'on doit plaindre sincèrement. Ce qui leur manque c'est la
famille, le pays, la patrie et la liberté. Nous avons pu converser avec eux entre quatre
yeux, parler notamment de la question du renvoi en Belgique, s'ils y trouvaient du travail.
L'enquête définitive est faite par la commandanture de la localité où les internés
prétendent trouver de l'occupation. Il va sans dire que beaucoup d'internés auxquels nous
avons parlé dans les camps déclaraient en effet qu'ils avaient trouvé du travail. Chaque
fois, le commandant nous a confirmé que l'enquête se faisait. On comprend que nous n'ayons
pas pu faire davantage, cependant les chiffres suivants suffisent. Des détachements d'ouvriers civils Nos. 4, 11, 16, 19 et 24, chacun d'eux composé de deux è quatre compagnies à faible effectif, 400 hommes en tout ont été renvoyés en Belgique. 996 hommes ont quitté les détachements et sont allés comme ouvriers libres dans la zone des armées et des étapes et dans les districts territoriaux.
D'ailleurs, on fait tout son possible pour soulager le sort des internés. Sans compter la nourriture et le logement, ils touchent un salaire de 40 à 60 centimes et peuvent
23r
acheter du tabac et des vivres
dans des cantines.Le médecin-major nous a assuré qu'il n'y avait eu qu'une seule épidémie de dysenterie, qu'on a surmonté en trois semaines. A Hirson, il y a un hôpital spécial de convalescence. Les médecins adjoints font un rapport détaillé tous les quinze jours. De plus, les internés peuvent écrire à leur famille une fois par semaine. Ils peuvent avoir aussi un congé pour aller en Belgique, mais il est vrai, sous escorte.
La situation dans les autres camps est la même, à St. Richaumont, où les internés sont logés dans une filature, Lemé, camp situé dans un joli verger, et à la Rouyerie, près de St. Gobert.
L'impression générale a été celle d'un ordre, d'une propreté à laquelle aucune autre nation n'est parvenue sauf les Anglais. Pourtant il faut plaindre ces jeunes gens, pour autant que ce ne sont pas des garçons de moralité défectueuse. Mais c'est la guerre. Et ceux qui m'accompagnaient me répliquaient qu'ils avaient offert aux ennemis d'entrer dans des négociations de paix. C'est un argument qui revient toujours et dont on ne peut méconnaitre la force. La prolongation de la guerre fait souffrir aussi les pauvres belges.
Le même jour, nous avons visité encore un cimetière à Colonfay, à l'est de St. Quentin, où reposent, inhumés de la même manière digne, les allemands et les français morts de la mort des braves dans la bataille de St. Quentin, le 29 et 30 août 1914. On a le cœur gros quand on lit des inscriptions comme celle-là: "Trois grenadiers inconnus". J'espère pouvoir faire reproduire une photographie du cimetière dans un journal suisse illustré. A St. Quentin, la garde prussienne surtout a versé son sang à flots et notre compagnon, un Berlinois du régiment Alexander, s'est arrêté la tête baissée, devant plus d'une tombe.
Carl Frey.